Publié le 24 mai 2011 sur le site http://un-echo-israel.net
Par Misha Uzan
Cette fois c’est un parlementaire israélien, un membre de la Knesset, qui a déposé plainte … contre un autre parlementaire.
Le 18 mai 2011 le député Ouri Ariel (Union nationale) a officiellement émis une plainte contre Dudu Rotem (Israël Beitenou), un autre député. Pas d’insultes politiques à l’horizon, pas d’oppositions droite-gauche ni d’hostilité judéo-arabe en question ; le motif de la plainte est simple : Rotem a fumé dans un lieu public, dans le bureau où se tenait la réunion de parlementaires, en contradiction avec la loi d’interdiction de fumer dans les lieux publics.
Nouveau rebondissement en matière de tabagisme qui semble montrer trois choses : oui la société israélienne est réactive au tabagisme et au tabagisme passif dans les lieux publics ; oui elle est réactive au non respect de la loi ; mais oui, aussi, la loi n’est que trop souvent pas respectée ou mal appliquée.
L’exemple de Dudu Rotem est significatif. Selon Ouri Ariel, ce n’est qu’après l’avoir menacé de porter plainte auprès du conseiller de justice du gouvernement que Rotem a finalement éteint sa cigarette. La scène est assez facile à imaginer, et elle est connue de tout militant contre le tabagisme passif puisque le fumeur qui enfume son prochain ne se préoccupe généralement que très peu du refus de ce dernier d’être enfumé, malgré les lois.
C’est en 1983 en effet qu’Israël se dote d’une première loi interdisant de fumer dans les lieux publics. Elle connaît plusieurs ajouts, précisions, modifications jusque 1994. A l’image des Etats européens elle interdit la fumée dans les centres commerciaux, les transports en commun, les lieux de travail. Mais comme partout nombre de lieux restent oubliés et enfumés. Aussi après l’Irlande, l’Espagne ou encore la France, depuis le 7 novembre 2007 une nouvelle loi vient interdire la cigarette dans les bars, les restaurants, les salles de fêtes. C’est depuis lors qu’en Israël aussi, les fumeurs occupent les rues, à l’extérieur des pubs. Ne pouvant plus fumer à l’intérieur, ils sortent et fument devant l’entrée, gênant les passants. Depuis 2007 donc, un attroupement dans la rue ne témoigne plus forcément d’une manifestation ou d’un accident, mais simplement de la présence d’un bar. La loi prévoit néanmoins la possibilité d’établir une pièce pour fumeurs, c’est généralement ce que font les restaurants, mais elle doit être fermée et, on le sait moins, ne peut dépasser 25% de la surface du lieu. Restent que, d’une part beaucoup ne respectent pas la loi, on l’a vu avec Dudu Rotem, et tous n’osent pas protester, et d’autre part Israël est un pays chaud. Or, même si on n’y pense pas forcément de prime abord, ce dernier point peut changer la donne. Car les restaurants et les cafés l’été peuvent être essentiellement en plein air. Les fumeurs s’en donnent alors à cœur joie pour allumer les cigarettes et les non fumeurs n’ont plus qu’à subir le tabagisme passif. Les choses sont plus graves encore dans les cafés qui, l’hiver, ferment l’espace extérieur au moyen d’une véranda en verre. Là encore les fumeurs interprètent la loi en leur faveur et prennent ce compartiment pour un espace en plein air, bien qu’il soit fermé et non réservé aux fumeurs comme l’exige la loi. Autant d’exemples qui montrent que beaucoup reste à faire pour lutter contre le tabagisme passif en Israël. Force est de constater qu’un non fumeur ne peut pas toujours s’attabler à un restaurant, un café, ou pire, sortir en discothèque, s’il refuse de s’enfumer.
Et pourtant les chiffres publiés dans la presse en février dernier semblent indiquer une baisse de fumeurs parmi les Israéliens. Selon un sondage publié par l’Organisme central de statistiques (l’équivalent de l’INSEE), le nombre de fumeurs en Israël était de 20,9% en 2009 (environ une personne sur cinq) contre 34% en 2000. Une baisse relativement importante. Les fumeurs seraient également moins nombreux parmi les personnes possédant un niveau d’études bac + 5 et plus (13% contre 26%), ce qui laisse envisager une baisse du nombre de fumeurs avec l’augmentation du nombre de diplômés dans le futur. De même les femmes fumeraient moins que les hommes (là aussi 13% contre 26%). L’étude soulignait encore la propension des Israéliens à prendre soin de leur corps et de leur santé, notamment par l’exercice d’un sport et d’alimentation saine.
Ce sont donc comme toujours en Israël des conclusions partagées qu’on serait amené à prendre, d’une part un retard dans la prise de décision, d’autre part le non-respect des règles par un certain nombre de gens, dont des élus de la nation, mais en revanche une tendance générale à la baisse du tabagisme et du tabagisme passif par une certaine prise de conscience du caractère nocif et dérangeant du tabac.